Ta vie en l’air : T’as soif. Plus de Sidi Ali au frigo.

Fatim Ayachi, chronique "ta vie en l'air", Telquel.

Aujourd’hui c’est dimanche, et tu as la gueule de bois. Tu vas dans la cuisine chercher une bouteille de Sidi Ali, tu ne bois que ça depuis que t’es née. Le choc : pas de bouteille, tu cherches dans le frigo, dans les placards. Walou. Tu demandes à Zhor, la femme de ménage, elle te répond que mustapha le chauffeur n’en a pas trouvé au supermarché. Tu pètes un câble. Tu risques de mourir de soif.

Tu retournes dans ta chambre, tu appelles ta mère, elle ne répond pas. Tu respires mal. Ton corps commence à réagir au manque. T’es accro à sidi Ali. Tu whatsapp Zee. Elle te dit qu’il ne lui reste que 20 Cl pour tenir le coup. Tu la supplies de te le laisser une gorgée, mais rien y fait. Tu commences à avoir une sensation de malaise général, fatigue, mal de tête. Tous les symptômes de sevrage forcé sont là. Tu angoisses. Tu culpabilises.

T’aurais pu alterner avec une autre marque d’eau. Maintenant c’est trop tard.Tu n’arrives plus à te tenir debout. Tu n’es plus capable de distinguer l’illusion de la réalité. Tu vois Mme Bensaleh qui te tend une bouteille d’eau, tu essaies de la rattraper mais il n’en est rien. Tu es en train d’entrer dans un delirium tremens. Tu te prends pour le prophète Ayyoub, tu frappes le sol de ton pied, et tu attends que la source de Sidi Ali jaillit. Tu perds le nord. Ta mère arrive à temps. Elle a pu se procurer quelques bouteilles au noir. Tu es sauvée.